Le lundi 18 janvier,
Le Port Manech, armement SOFLUMAR, caboteur de 2800 tonnes de
port en lourd, construit en Norvège en 1953 par le chantier
Drammen Slip Verksted, ex Elisabeth Amlie, francisé en
1960, avait chargé 2500 t de super carburant aux appontements
d'Orcher à destination de Caen. Vers 23 h 00 Au passage
du sas Quinette de Rochemont, pour gagner du temps, le commandant
avait libéré le pilote. Le temps était clair
et la mer calme, légérement houleuse.
Le cargo U.S Lucile
Bloomfield, en provenance de Southampton, faisait route pour entrer
au Havre après avoir pris le pilote à l'entrée
du chenal.
Le cargo
Lucile Bloomfield entrant au Havre, devant le sémaphore
et le quai des "Abeilles"
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Le Port Manech était
précédé dans le chenal par le cargo espagnol
Picogris et suivi par le bateau pilote Francoyse de Grâce.
Vers 21 h 37, le pétrolier approche des bouées
A3-B3, le commandant décide de venir en grand sur la
gauche pour traverser le chenal et faire route sur les bouées
d'Ouistreham à l'entrée du canal de Caen. Il
signale sa manoeuvre par deux coups de sifflet brefs qu'il
renouvellera cinq fois. Au même moment, le commandant
et le pilote du Lucile Bloomfield qui viennent de croiser
le Picogris, aperçoivent le Port Manech qui leur coupe
la route. Malgré la manoeuvre effectuée pour
éviter la collision, le cargo aborde le pétrolier
au niveau du château. Le choc est violent, l'étrave
du cargo s'est enfoncée de plusieurs mètres.
Une explosion se produit, le pétrolier s'enflamme de
l'avant du château jusqu' à l'avant du bloc dunette.
Le feu se communique rapidement sur le Lucile Bloomfield,
jusqu'à hauteur de la passerelle. Les deux navires
se séparent. La mer est recouverte d'une nappe d'essence
embrasée, elle enveloppe le Port Manech qui dérive.
Le commandant organise l'évacuation,
une partie de l'équipage est sur l'avant du navire,
l'autre à l'arrière qui tente de mettre une
embarcation à la mer. A bord, vingt-cinq officiers
et marins ainsi que deux passagères autorisées
non inscrites sur le rôle d'équipage.
Aussitôt l'alerte déclenchée
par le sémaphore, plusieurs remorqueurs des "Abeilles"
et le canot de sauvetage des "Hospitaliers Sauveteur
Bretons" se porteront sur le lieu de l'abordage. Le
bâteau-pilote Françoyse de Grâce qui suivait
le pétrolier met deux pilotines à la mer, assisté
par le bâteau-pilote de Rouen, il ramènera à
terre dix-neuf hommes et une femme, le bâteau-pilote
de Rouen deux hommes, ils seront tous dirigés vers
l'hôpital. deux sucomberont à leurs brûlures,
cinq seront portés disparus.

Sauveteurs
et rescapés à bord du bateau Pilote "Françoyse
de Grâce "- Photo collection Michel PEROT
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Après avoir maîtrisé
l'incendie le commandant du Lucile Bloomfield fera route vers
le port.
Le Port Manech, tout en continuant
de brûler, dérivera vers les falaises d'Octeville
où il s'échouera. Les corps de quatre marins
portés disparus seront retrouvés à bord.
L'épave qui contenait encore des milliers de litre
d'essence, jugée dangereuse, sera dynamitée
le samedi 13 février.
L'épave
en flamme du Port Manech sous les falaises d'Octeville,
au nord du cap de la Hève
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Après enquête,
le tribunal maritime du Havre se réunira en février
1966 pour déterminer les responsabilités.
Le
bateau-pilote du Havre "Françoyse de Grâce"
qui participa au sauvetage
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L'équipage
du bateau Pilote - Photo collection Michel PEROT
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Source: articles
de presse régionale et maritime. Témoignage de
mon père Albert JEGOU, cuisinier à bord de la
Francoyse de Grâce (seconde bordée), en repos le
18 janvier.
Photos du pétrolier
Port Manech et du cargo Lucile Bloomfield. SHD Brest, fond photographique
amiral ADAM.
Photo Francoyse
de Grâce, collection personnelle.
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